Catégorie(s) : AutographesDES FORETS (Louis-René). 16 L.A.S. ou C.A.S. à François Dominique. 37 pages de divers formats. Charost (Cher) ou Paris, 12 octobre 1990 - 25 mai 1993. Enveloppes conservées. Une double page de nuancier, annotée par F.D. et une coupure de presse (en allemand). Passionnante correspondance, amicale, littéraire, musicale avec l'écrivain François Dominique, co-fondateur des éditions Ulysse Fin de Siècle. Il a également publié un beau texte consacré à Des Forêts : A présent (Mercure de France, 2013). La correspondance s'amorce au motif d'un texte destiné aux Cahiers Le Temps qu'il fait consacré à Des Forêts (Pas de mémorial), puis vite s'étoffe et aborde maints sujets. Mentions de : Bonnefoy, Du Bouchet, Bettencourt, Blanchot (à plusieurs reprises au sujet de projets éditoriaux, Une voix venue d'ailleurs trois textes consacrés à L.-R. D.F.), Alain Cuny, Frénaud, Laporte, Michel Lagrange, etc. Il est aussi très fréquemment question de musique - Nietzche compositeur, Arvo Pärt, Monteverdi, Ravel, Stockhausen, Wosseck, de Berg, Schubert, etc. - (Des Forêts a publié nombre de chroniques et d'articles sur la musique), mais aussi de la vie quotidienne (que Des Forêts partage entre la campagne et son appartement parisien tandis que son correspondant est enseignant à Dijon), des lectures publiques (dont une organisée à Dijon), etc. " Il y a chez moi, ces temps-ci surtout une incapacité à correspondre avec qui que ce soit, et je me reproche sans cesse ma négligence.(…) [Votre] lettre m'avait profondément touché et je vous en remercie de tout cœur, comme de vos belles pages sur les Mégères de la mer que Dominique Rabaté m'avait fait parvenir et que j'ai relues ce matin même, en me réjouissant qu'elles figurent dans ce prochain cahier qui m'est un peu indûment consacré… "" La sortie du cahier m'a jeté dans un si grand désarroi - dont je parviens mal à sentir comme à m'en expliquer les raisons - que j'ai éprouvé la nécessité de quitter Paris où je ne suis revenu seulement hier au soir " (…) " Roger Laporte m'a adressé ses Etudes dont je ne connaissais que très peu d'entre elles, et cette lecture m'a passionné de bout en bout, au point que je ne pouvais parvenir à m'en détacher. Dans sa dédicace, il me précise que c'est son tout dernier livre, mais comment le croire alors que le thème inlassablement repris tout au long de l'ouvrage est l'exigence d'écrire ? Qui d'ailleurs pourrait prendre une telle décision et plus encore s'y tenir, ressentirait-il cette exigence comme une malédiction car en vérité ç'en est une. "" (…) Voici quelques années, j'avais entrepris de remonter la côte depuis le Pays de Caux jusqu'à Dunkerque en compagnie d'André du Bouchet, mais comme il avait dormi pendant quasiment tout le parcours, il m'a demandé de le refaire en sens inverse, ce que j'ai accepté de bonne grâce car j'aime beaucoup ces grèves du Nord : elles me rappellent tant de souvenirs d'enfance. Vers l'age de dix ans, j'allais souvent chez l'un de mes oncles qui habitait une merveilleuse maison située au bord de l'océan, non loin de Dieppe, laquelle a été entièrement détruite par un bombardement d'artillerie lors de la tentative avortée de débarquement anglais en 41 ou 42. J'y suis retourné après la guerre pour n'y retrouver que des ruines. "" J'ai trop tardé cette fois encore à vous remercier de votre dernière lettre qui est pourtant venue m'apporter un réconfort dans le marais de problèmes, peut-être tout imaginaires, que me pose Ostinato et où je m'enlise chaque jour davantage sans entrevoir clairement aucune solution qui me permettrait de retrouver un tant soit peu de cette assurance nécessaire à la poursuite du parcours : elle me fait même si entièrement défaut que je bute devant le moindre obstacle. Est-ce l'effet de l'âge, ou ne serait-ce pas plutôt que cette entreprise a quelque chose de diabolique et qu'en m'y engageant au départ, j'ai trop préjugé de mes forces, pêché par présomption ? Votre suggestion de titrer chaque partie me paraît excellente, j'y avais d'ailleurs songé moi-même, encore que la difficulté majeure resterait entière qui est de donner à l'ensemble structure et cohérence internes. Pardonnez-moi ces sombres divagations, cher François… "" Voici donc (…) Anacrouse dont Maurice Blanchot m'a permis de disposer comme je l'entendais. A vrai dire je lui avais suggéré la revue Recueil (il en ignorait jusqu'à l'existence), mais je pense qu'il ne verra pas d'objection, tout au contraire, à une édition en plaquette chez " Ulysse fin de siècle ". Sans doute, pour l'étoffer, pourriez-vous en effet y joindre les deux textes parus dans la Quinzaine et le Cahier " Le Temps qu'il fait ", et selon l'ordre qui vous paraîtra le plus judicieux. Mais de toutes façons, avant d'en décider, il conviendrait, je pense, que vous entriez directement en rapports avec lui… "" Votre programme de publication me paraît on ne peut plus satisfaisant, et je ne vois rien à ajouter. Le titre Une voix venue d'ailleurs est celui que j'aurais moi-même choisi, avec peut-être en effet ce sous-titre. Mais c'est naturellement à Maurice Blanchot d'en décider… "" M'envoyer 30 exemplaires du livre de Maurice Blanchot, c'est beaucoup trop, je ne saurais qu'en faire - Cinq tout au plus, et mettez les autres en vente ou bien, si vous le désirez, adressez-les en service de presse à des lecteurs et amis de Blanchot - René Laporte, Pierre Madaule, Derrida, Dobbels, Klossowski, pour ne nommer que ceux qui me viennent à l'esprit, peut-être aussi Ph. Jaccottet, Y. Bonnefoy, J. Dupin, M. Deguy, M. Nadeau… " (…)" J'avais emporté ici le film vidéo reçu la veille de mon départ de Paris, mais je n'ai pu le regarder ni moins encore l'écouter jusqu'au bout tant cette lecture m'a paru fastidieuse et peu convaincante. Comment ai-je pu infliger pareil supplice à ce malheureux auditoire dijonnais, et pour récidiver peu après à Poitiers, puis à Cambridge ? C'est d'un ennui indicible. Aussi bien je ne poursuivrai pas dans cette voie, j'en avais d'ailleurs pris la décision quelques jours auparavant en répondant négativement à deux autres sollicitations, parisiennes cette fois. " (…)" A mon tour de vous recommander l'audition du Chant du Cygne de Schubert, avec B. Fassbaender et Reinmann. Procurez-vous ce compact-disque sorti assez récemment : c'est d'une beauté poignante.En revanche, même si je pouvais remettre la main dessus, je me garderais bien de vous envoyer la cassette de mes improvisations au piano : un véritable casse-oreilles, pour autant que je m'en souvienne… " 4500 € |